Imprimé depuis le site Archives du Formindep / publié le vendredi 28 mai 2004

Un dangereux mélange des genres

De nouvelles connaissances scientifiques ont récemment permis de réviser le rapport bénéfice - risque du traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS) incitant à une utilisation plus restrictive de ce traitement [1].

L’instauration de ce traitement chez les femmes nouvellement ménopausées doit maintenant être reconsidérée sur la base de ces nouvelles données et sa poursuite réévaluée chez les femmes qui en bénéficiaient jusqu’alors.

Dans ce contexte, un récent document intitulé : « Traitements hormonaux substitutifs de la ménopause, rapport d’orientation » rédigé à la demande du Directeur général de la Santé, vient d’être publié sur le site de l’ANAES.
Son élaboration a été coordonnée conjointement par l’ANAES (Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé) et l’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) avec la collaboration de l’INSERM (Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale).
Ce document vise entre autres à « proposer des orientations générales concernant le THS et la ménopause et les modalités d’information des femmes et des professionnels »

Or, on lit page 11 de ce rapport que, pour permettre la diffusion la plus large de ces nouvelles recommandations auprès des professionnels, on préconise d’« utiliser au besoin la visite médicale des laboratoires ».

Le collectif Formindep « pour une formation médicale indépendante au service des seuls professionnels de santé et des patients », s’inquiète de ce curieux mélange des genres qui consisterait à faire diffuser des recommandations « officielles » visant à la santé des populations par les représentants commerciaux des firmes pharmaceutiques dont les objectifs sont seulement commerciaux et publicitaires.
Le Formindep regroupe des professionnels de santé et des patients soucieux de promouvoir une information des professionnels de santé indépendante et de qualité, dégagée de toute influence d’organismes poursuivant d’autres intérêts que ceux de la santé des patients. De telles propositions vont clairement à l’encontre de cet objectif éthique.

En permettant la transmission d’informations professionnelles relevant de la santé publique par des intermédiaires poursuivant des buts promotionnels et commerciaux, les auteurs de ces propositions prennent le risque que ces informations parviennent aux professionnels de façon partielle et partiale, voire déformée.

Ces propositions vont à contre-courant du mouvement professionnel actuel, dont le Formindep est un des acteurs, qui vise à plus de clarté et de transparence dans la formation médicale en demandant que la différenciation soit faite nettement entre ce qui relève de l’information promotionnelle et de l’information scientifique.

Ces propositions font le jeu de lobbies industriels et commerciaux en les installant dans un rôle d’information scientifique et de santé publique qui ne peut être le leur, mais qu’ils tentent d’imposer auprès des professionnels et du grand public pour faire passer leurs messages publicitaires et commerciaux.

De telles propositions, concédant de fait à des organismes à but lucratif des objectifs de santé publique, témoignent de la faiblesse actuelle des outils publics de diffusion de l’information médicale, révélatrice de l’absence d’une réelle politique de santé publique en France et de l’influence des lobbies.

Le Formindep demande donc que cette proposition de confier la diffusion de l’information scientifique concernant le traitement hormonal substitutif de la ménopause à des intérêts commerciaux soit retirée.

Plutôt que de prendre le risque d’une information partiale et brouillée des professionnels de santé par des tiers privés, le Formindep demande que soient développés en France, à l’instar de nombre de pays européens, des outils publics de communication de l’information médicale performants, fiables, indépendants et réellement transparents.


[1Prescrire Rédaction “Hormonothérapie substitutive de la ménopause (suite)” Rev Prescrire 2004 ; 24 (246) : 25-29