Imprimé depuis le site Archives du Formindep / publié le jeudi 8 novembre 2007

Le rapport de l’IGAS sur l’information des médecins généralistes sur le médicament

Le rapport de l’IGAS sur l’information des médecins généralistes sur le médicament a été publié le 31 octobre dernier après avoir été remis à la ministre de la santé le 1er septembre. Nul doute qu’elle aura eu le temps de se l’approprier pour en tirer la substantifique moelle.

Le Formindep a été auditionné dans le cadre de ce rapport et y est cité à plusieurs reprises.

Que dit en substance ce rapport ?

 les médecins généralistes sont abreuvés d’information publicitaire par les firmes pharmaceutiques sous la forme essentielle de la mal nommée visite médicale, mais également par le truchement des dealers, pardon : leaders d’opinions complaisants, pour ne pas dire plus, aux firmes.

 Avec la visite médicale, les firmes dépensent au minimum 25 000 euros par an et par généraliste (soit 40 % du revenu moyen d’un généraliste) pour promouvoir leurs nouveautés médicamenteuses, toujours plus chères et (très) rarement plus efficaces que les anciennes.

 Cette somme colossale (3 milliards d’euros) qui ne sert qu’à augmenter les chiffres d’affaire des firmes, est logiquement répercutée dans le prix des médicaments, et donc prise en charge en grande partie par la collectivité nationale à travers le remboursement des médicaments par la sécu. En clair : c’est la sécu, donc les assurés, qui paye la publicité des labos.

 Les médecins généralistes sont pour la plupart dans l’incapacité de trier le bon grain de l’ivraie, c’est-à-dire de faire la part des choses entre une information fiable et scientifique, et la promotion publicitaire. Nous redisons que cette capacité à trier l’information est une véritable compétence professionnelle que les médecins n’ont pas acquise et ne maîtrisent pas pour la plupart, du fait entre autres d’une formation médicale initiale et continue sous la coupe des firmes pharmaceutiques.

 Les institutions officielles (Afssaps et HAS) chargées de ces missions de débrouillage de l’information, et surtout de diffusion d’une information de qualité, ne remplissent pas leur mission, faute de moyens et (c’est nous qui le rajoutons) de volonté politique et éthique.

 La Cnamts (sécurité sociale) se mêle, à travers des “délégués à l’assurance maladie” (DAM) qui vont chez les médecins, de diffuser de son côté une information sur les médicaments. Mais elle s’y prend n’importe comment, et son action timide, de mauvaise qualité et mal organisée, ne suffit pas à contrecarrer la pression de l’information commerciale des firmes. Les initiatives efficaces sont éliminées, comme l’expérience de la CPAM de l’Aude. De plus persiste pour les médecins le doute sur l’objectif réel de ces visites des DAM : meilleur soin au moindre coût ?, rationnement des soins ?, contrôle des médecins ?

 Contrairement à nombre d’autres pays, la profession médicale est incapable de s’organiser globalement pour accéder à une information de qualité. Et c’est là que le rapport cite en exemple, malgré tout, la revue Prescrire et le Formindep  !

Que propose ce rapport ?

Deux axes principaux pour résumer :

1 – que les organismes officiels (HAS et Afssaps) se décident enfin à faire leur travail, et à mettre en œuvre les missions dont ils sont chargés : assurer par eux-mêmes la large diffusion d’une information fiable sur le médicament et, concernant la HAS, prendre les moyens de vérifier le contenu effectif des visites médicales des firmes, en ne se contentant plus de leurs déclarations de principe et de bonne volonté. Ce que le Formindep avait demandé en mai 2005 lors de sa rencontre avec la HAS à propos du scandale de la diffusion de ses recommandations par les délégués commerciaux des firmes.

2 – que plutôt que de développer des actions sans moyens et stratégie efficaces pour contrecarrer la pression commerciale des firmes, l’Etat décide de diminuer cette pression, en limitant et contrôlant davantage la visite médicale.

Les propositions sont les bonnes et font d’ores et déjà couler beaucoup d’encre, voire d’acidité dans l’attente qu’elles soient mises en application. Mais, lorsque l’on constate l’état de soumission [1] de ceux qui nous gouvernent aux intérêts privés et industriels en matière de santé, il ne faudra qu’un tout petit peu de mauvais esprit pour s’imaginer que ce rapport a déjà fait l’objet du classement qu’il mérite dans une profonde armoire d’un couloir obscur du ministère.


[1aller sur http://www.viewontv.com/ump/convention_270606/index.php
puis cliquer sur « espoirs et enjeux pour le système français de santé » et visionner de la 32ème à la 42ème minutes. Puis, visualiser sur la même page : « intervention d’Yves AGID », 9ème à 13ème minutes.