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L’empire contre-attaque

Alors que les pays anglo-saxons s’émeuvent des rapports délétères entre l’industrie pharmaceutique et les médecins, la France met en place le financement, et donc le contrôle, de la formation médicale continue par l’industrie pharmaceutique.

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Le mois de novembre 2006 sera sans doute à marquer d’une pierre noire dans l’histoire de la médecine française. Un évènement d’une gravité exceptionnelle est survenu dans un silence feutré, évènement qui détruit le dernier bastion de qualité d’une médecine longtemps considérée comme une des meilleures du monde.

Mais quel est donc cet évènement dont vous n’avez pas entendu parler ? Il est très simple : c’est une charte de bonnes pratiques rédigée par le LEEM avec les CNFMC (Conseils Nationaux de Formation Médicale Continue) et validée par le ministère de la santé qui confirme et précise le cadre du financement de la formation des médecins par l’industrie pharmaceutique.
Rien d’extraordinaire pensez vous ? Tout le monde sait à quel point l’industrie pharmaceutique entoure les médecins, les fait voyager, les fait dîner, équipe leur service hospitalier ou leur cabinet ? Mais voila, jusqu’ici, c’était plus ou moins interdit, plus ou moins honteux, plus ou moins caché ; désormais, le processus pourra être industrialisé.

Huit ans pour construire l’étoile noire

En 1998, on pouvait lire dans la revue Stratégies : "Les laboratoires regardent d’ailleurs avec intérêt les futurs développements de la formation médicale continue (FMC), une des priorités du gouvernement. Les industriels espèrent bien obtenir l’autorisation de travailler en partenariat avec les futurs centres de formation agréés. Certains, comme Servier dans le domaine des pathologies veineuses avec son produit Daflon®, ont déjà réussi à devenir des acteurs de référence en matière de FMC."

Il aura fallu huit ans... L’autoroute est désormais grande ouverte et la manne financière de l’industrie pharmaceutique va pouvoir prendre le contrôle du dernier maillon qui lui manquait pour manipuler la totalité ou presque de l’information médicale et de la prescription de médicaments.

Certes, il y a bien un article (5) du code de déontologie médicale qui stipule "Le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit." Limpide dans son énoncé, cet article est devenu purement décoratif, annulé par l’article L4113-6 du Code de la Santé Publique qui prévoit que l’industrie pharmaceutique pourra jouer le rôle d’agence de voyage, de fournisseur d’experts et d’agent logistique général lors d’invitations de médecins à ses opérations promotionnelles.

L’industrie pharmaceutique contrôle l’essentiel des outils de la communication médicale

L’industrie avait déjà transformé en faire-valoir la quasi totalité de la presse médicale généraliste qui ne survit que par elle ; manipulé la presse grand-public à l’aide de ses agences de communication et de pressions sur les journalistes ; manipulé, financé voire créé de toutes pièces des associations de patients et des sociétés "savantes" médicales. Il lui manquait une mainmise complète sur les médecins. La visite médicale trouvait ses limites : les démarcheurs de l’industrie sont de moins en moins bien reçus par les médecins qui sont saturés par cette promotion intensive et éhontée. Agir sur la formation elle-même constituait le rêve absolu du marketeur industriel. Jusqu’ici, il devait se contenter de soirées pendant lesquelles il faisait passer son message publicitaire en échange d’un dîner, voire d’un spectacle. Les amicales de médecins à vocation gastronomiques y trouvaient leur compte et beaucoup d’associations de formation médicale un financement au prix de la perte de leur indépendance.

Pour les médecins spécialistes, l’affaire est rodée depuis longtemps : l’industrie les invite (avion, hôtel) à des congrès ou pseudocongrès qui sont en fait des manifestations promotionnelles où tout est payé directement ou indirectement par les sponsors : la salle, les orateurs, les repas, les faux frais. Les médecins sont ravis de leur escapade et sont intimement persuadés de s’être formés, alors qu’ils ont été déformés... Autour de ces réunions souvent dénommées pompeusement "symposium", un vrai congrès sert d’alibi, quand il n’est pas tout bonnement absent : l’événementiel est une nouvelle science de la communication qui consiste à transformer du vent en évènement, moyennant beaucoup d’argent bien sûr. Le budget promotionnel de l’industrie pharmaceutique pour la France se compte en milliards d’euros.

Le ministère le plus bête du monde

Pour les généralistes, il existait depuis plusieurs années un fond de financement de la formation, alimenté par leurs cotisations et surtout par les autorités de tutelle. Ce financement permettait pour un coût modique l’organisation de formations souvent de bonne qualité, et totalement indépendante de tout sponsor privé. Dans une stratégie à courte vue, le ministère a préféré livrer cette formation à l’industrie, sans réaliser que les coûts induits par cette collusion serait bien sûr plus élevés à court terme pour la collectivité. Est-ce vraiment de la naïveté ? Peut on croire que des énarques s’imaginent que l’industrie va pouvoir financer des "formations" sans avoir de droit de regard sur leurs contenus ? Qui peut croire en 2006 que le payeur n’influence pas le payé et n’exige pas de retour sur investissement ?

Mais il n’y a pas que le ministère de la santé pour se réjouir d’une telle fortaiture : les représentants de la profession ne sont pas en reste. Dans Impact Médecin du 16 novembre 2006, le Dr Ortolan qui préside le Conseil National de la FMC déclare "Ce texte était nécessaire pour tout le monde. Les associations de formation n’auront plus à se justifier de leur éventuelle dépendance de l’industrie pharmaceutique". Plus loin, il précise "la multiplicité des financement doit être privilégiée pour la même action". Au moins, le Dr Ortolan reste cohérent avec ses convictions.

Le but de l’industrie est de vendre des médicament, qui pourrait en douter ?

Un document très intéressant à été publié en 2005, il n’est malheureusement pas public : intitulé "Baromètre 2005 de l’Efficacité Marketing dans l’Industrie Pharmaceutique", il a été rédigé à partir d’une étude menée par UNILOG MANAGEMENT et le GROUPE HEC, réalisée auprès de 40 acteurs de l’Industrie Pharmaceutique et plus de 70 dirigeants.

Un paragraphe d’introduction annonce la couleur :

"Les prescripteurs en ville, et dans une moindre
mesure à l’hôpital, sont de plus en plus sollicités,
en particulier par la visite médicale. Le nombre de
médecins qui refusent de recevoir les visiteurs
médicaux ou qui réduisent le nombre de contacts
à quelques rendez-vous par mois augmente régulièrement.
La concurrence devient donc de plus en
plus vive pour accéder au médecin. On arrive à
une contradiction structurelle entre les exigences
d’un ciblage de plus en plus élaboré et des possibilités
de rendez-vous qui sont, de plus en plus souvent,
liées à des relations privilégiées entre
médecins et visite médicale. De plus, la cible traditionnelle
des prescripteurs n’est plus aujourd’hui
unique. Il faut y associer celles des dispensateurs,
des professions paramédicales et, également, des
patients."

Nous ne sommes pas chez des philantropes, et c’est d’ailleurs tout à fait normal : chacun son rôle et son métier. Le rôle de l’industrie est de vendre des médicaments et de satisfaire ses actionnaires. La santé publique n’est pas dans ses missions. Les quelques laboratoires qui pouvaient avoir ce type d’idéal ont été absorbés depuis longtemps par les majors du secteur, faute d’avoir concentré toute leur énergie sur leurs forces de vente.

Plus loin, la formation médicale continue des médecins est identifiée comme une réponse possible à l"accès au prescripteur". Il va s’agir de la "piloter". On ne peut être plus clair et le concept de pilotage et très parlant : piloter, c’est conduire un groupe selon un itinéraire que l’on a décidé et tracé, c’est l’amener là ou l’on veut qu’il aille.

"Dans ce cadre, comment assurer le meilleur retour
sur investissement possible et en fonction de quelles
actions marketing ? Contrairement à l’idée généralement
admise, il n’y a pas de tendance unanime vers
une réduction des dépenses Marketing/Ventes.
Certes, tous nos interlocuteurs ont insisté sur le
besoin beaucoup plus important qu’auparavant de
la justification de chaque investissement. Et la
mesure de l’efficacité des différents moyens d’action
Marketing/Ventes déployée est souvent mise en
avant, même si certains soulignent les difficultés
d’attribuer à un seul facteur les résultats d’une opération.
Plus qu’une réduction, il s’agit d’une optimisation (...)"

"Piloter" la formation médicale continue

"Une des réponses possibles à l’accès aux prescripteurs
semble être une meilleure utilisation de la
Formation Médicale Continue et une mise en oeuvre
transparente. Plusieurs de nos interlocuteurs soulignent
que seule l’industrie pharmaceutique peut
financer cette formation. Il faut donc la formaliser,
l’organiser et la piloter. Il faut également définir clairement
les contenus fondés sur les pathologies et
non sur les produits (...). L’industrie doit faire collectivement
des propositions sur ce sujet sans attendre
que les pouvoirs publics prennent
unilatéralement des décisions qui auront, sans
doute, la forme de nouvelles taxes."

L’industrie pharmaceutique est d’ailleurs très cohérente à ce sujet : elle refuse toute forme de financement de la formation de type "pot commun" ; elle n’est intéressée que par les formations qu’elle pilote elle-même. Mais cela n’empêche pas certains de croire envers et contre tout que ce "pilotage" ne nuit pas à l’indépendance de la formation.

Ailleurs, dans l’intervention d’un marketeur industriel lors d’un séminaire , on peut lire :

"L’identification de cinq profils de médecins ne vise pas, en première instance, à mettre en avant des médicaments. « Il s’agit pour nous de travailler en affinité avec notre cible en lui apportant des solutions et des services adaptés, liés bien entendu à nos produits », insiste Christophe Bouguereau. Ces services prennent la forme de formations médicales continues, d’assistance à distance aux patients, de formation par des infirmières à l’auto injection, d’envoi de guides spécialisés, etc. Le profil du médecin dicte le service qui lui est proposé."

En première instance...

Notez bien la précision initiale "en première instance" dans le premier paragraphe de cette citation. Il s’agit pour l’industrie de tisser des liens initiaux d’allure anodine et paraissant déconnectés de toute action commerciale. Mais une fois que la relation est tissée telle un toile d’araignée, que le médecin et son patient sont devenus dépendants, les choses peuvent changer...

L’industrie en rêvait, le ministère lui offre : la formation post-universitaire des médecins sera donc désormais pilotée par l’industrie pharmaceutique. Si rien n’est fait rapidement pour arrêter cette mascarade, la santé publique et l’assurance maladie vont en payer les frais, sans doute irrémédiablement. Les anglosaxons réagissent et ont compris les dangers de ces compromissions ; en France, nous les mettons en place sous l’oeil bienveillant des autorités de tutelle.

A quand le financement de l’Université par le LEEM ? En toute indépendance bien sûr ;-)


Bibliographie sommaire concernant les dangers de la formation médicale financée par l’industrie pharmaceutique :

 Educating Health Professionals about Drug and Device Promotion : Advocates’ Recommendations
PLoS MEDICINE

 Doctors must not be lapdogs to drug firms
BMJ


Illustration : Gilles Tricoire http://www.staile.be

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